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A la découverte du Cambodge

20 mai 2025 Récit de voyage
Publié par Jacqueline DRUET
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A la découverte du Cambodge

du 7 au 18 avril 2025 

Un pays accueillant au riche patrimoine et à la vie bouillonnante, dont les habitants font preuve de résilience, face au sombre passé récent.

 

Sous la houlette de l’ARAF qui a collaboré avec  Voyage Plus, nous formons très vite un groupe sympathique de 25 participants, partageant au jour le jour nos découvertes ainsi que nos photos sur Whatsapp, grâce à la belle initiative de l’une d’entre nous.

Dés l’atterrissage à Phnom Penh, nous rencontrons notre guide, Ho Sim, sérieux, réservé, extrêmement aimable, parlant un français très correct ; il nous renseignera sur son pays, en agrémentant ses commentaires d’anecdotes amusantes ; mais aussi notre chauffeur, Pnoeum, doté d’un sourire indéfectible, malgré d’incroyables embouteillages qu’il saura déjouer très habilement. Nous visitons en bus, puis en cyclo-pousse, la capitale, qui nous surprend par son effervescence, par la variété de ses constructions, traditionnelles, coloniales, contemporaines. Des étals de marchands dans tous les coins ; même s’ils sont aussi regroupés au marché central, des motos de tous les calibres, montées surtout par une population de jeunes, mais aussi par des familles entières (à 3, 4, 5, parents et enfants sur le même engin) qui circulent avec adresse, zigzaguant dans les rues en un véritable ballet,et cohabitent avec cette animation débridée, le calme, la sérénité du Palais Royal et de la Pagode d’Argent de style classique khmer, où séjourne parfois Sa Majesté Norodom Sihamoni, dont on aperçoit le portrait sur les panneaux de la ville. L’imposant monument de l’Indépendance, en forme de lotus, trône sur le boulevard Norodom.

 

Prenant la direction de Kratie, vers l’est, nous roulons sur la zone inondable du Mékong, que nous longeons, avec de part et d’autre des maisons sur pilotis. Voici Kompong Cham, le rivage des Chams, ce peuple venu d’un royaume voisin aujourd’hui disparu, en conflit au 10e siècle avec les Khmers, dont nous verrons les combats sur les fresques des temples d’Angkor. Un curieux pont en bambou, unique en son genre, permet aux piétons d’accéder à une petite île au milieu du Mékong. Et aux portes de la ville, une pagode du 19e siècle, s’appuie sur les ruines d’un temple du 12e siècle. Des buffles d’eau paissent tranquillement aux abords. Et quelle aventure que la promenade sur la charmante île de Koh Trong, en charrette à cheval, en tuk-tuk, ou à vélo pour les plus courageux, sous une chaleur conséquente ! Toujours des maisons sur pilotis avec leurs jardins vivriers, très fleuris, où poussent manguiers et pamplemoussiers, et la vie simple et tranquille des habitants qui se consacrent aussi à la pêche. Quelques vaches efflanquées que notre guide appelle avec humour des « vaches-mannequins »

Après une croisière à la découverte des dauphins de l’Irrawady, nous passons devant une plantation de manioc, récolté en fagots, pour visiter une plantation de poivriers : le poivre, apprend-on, est l’une des cultures qui concourent à la renommée du Cambodge, surtout le poivre de la région de Kampot : nous en ramènerons dans nos bagages. Nous avons déjà visité une plantation d’hévéas, nombreux dans le pays. Ici, des monticules de terre apparaissent, garnis de bandelettes de papiers colorés : hommages des familles à leurs morts qui sont enterrés librement au-dessous. Quant à l’île de la Soie, nous avons l’occasion d’observer le travail des artisans, depuis l’élevage des vers jusqu’au tissage de vêtements.

Un autre moment fort nous attend : le retour à Phnom Penh en naviguant sur le Mékong dans une jolie nacelle décorée de lumignons roses, pour assister au coucher du soleil sur la capitale. Somptueux ! Et tout cela couronné d’un dîner sur la terrasse au bord du fleuve rejoignant ici le Mékong : le Tonlé Sap.

Puis départ vers l’ouest, cette fois-ci : Oudong, ancienne capitale ; il faut gravir 500 marches pour accéder à des stupas d’époques différentes abritant les restes des rois, et de l’autre côté, une pagode contient une grande statue de Bouddha. Au pied de la colline, un marché regorge de légumes, de fruits et de mets grillés dont des crabes que nous goûtons. Nous avions déjà vu des araignées grillées dans un précédent marché et nous verrons bientôt au bord des routes, des rats (des champs) grillés au barbecue ! Plus loin, une pagode, celle de Kompong Kralach, datant du 15e siècle, qui a survécu à toutes les destructions. Notre guide nous confie que les Khmers rouges, qui ont pris le pouvoir et fait régner la terreur de 1975 à 1979, ont tenu à conserver certaines richesses architecturales, malgré leurs atrocités envers les gens.

 

Nous voici à Battambang, deuxième ville du Cambodge, entourée de campagnes avec maisons sur pilotis et nombreuses rizières. « Riz le matin, riz le midi, riz le soir : la nuit on ri-gole ! » énonce Ho Sim, décrivant ainsi la nourriture quotidienne de la majorité des Cambodgiens : ils vivent dans la pauvreté. Avec Sisophon et Siem Reap, Battabamg a fait partie du pays du Siam (Thaïlande actuelle) qui convoitait ces provinces. Ce n’est que sous le protectorat français (1847-1939), qui procéda petit à petit à une administration directe du pays, que la restitution des provinces perdues, fut obtenue en 1907. Siem Reap signifie d’ailleurs « Siam aplati » ou « défaite totale du Siam »

Petit tour amusant sur le Bamboo Train à travers les rizières ; et visite du marché où l’on trouve de tout, même des serpents ! Mais le point fort, c’est le cours de cuisine au restaurant Narykitchen : le chef cambodgien, dynamique, nous apprend à cuisiner des nems, l’amok (plat national de poisson rôti), le lok-lak de bœuf et les bananes fondantes au lait de coco. Un gâteau offert par une participante pour son anniversaire couronne le tout. Après ce repas délicieux concocté par nos soins sous la direction du chef de Narykitchen, un moment plus sombre nous attend : en 4x4 nous accédons à la colline de Phnom Sampeau d’environ 140 mètres de hauteur. Au sommet, donnant sur un vaste panorama, une grotte bouddhiste très profonde a été utilisée par les Khmers rouges pour y précipiter leurs victimes qui mouraient de leur chute. A proximité, des statues ont été érigées, montrant les atroces tortures perpétrées. En 3 ans et demi, 2 millions de victimes ont été torturées et tuées. Si le premier ministre actuel, Hun Sen, gouverne de façon ferme le pays, il a contesté l’autorité de Pol Pot le dirigeant sanguinaire des Khmers rouges, s’est réfugié au Vietnam en 1977, pour revenir avec les Vietnamiens, combattre avec succès les Khmers rouges, en 1979, explique notre guide.

 

Heureusement, un autre spectacle, plus agréable, s’offre à nous ! L’envol par milliers de chauves souris, qui sortent d’une autre grotte à fleur de colline pour aller chercher des insectes dont elles se nourrissent. Ponctuelles, à 18 h pile, elles sortent dans la même direction, formant un nuage plein de circonvolutions ; elles reviendront dans leur gîte à 2 h du matin.

 

Départ pour Siem Reap et visite du musée national d’Angkor. Grandiose! Organisé en 8 galeries, il présente de belles sculptures trouvées sur le site d’Angkor qui permettent de comprendre l’histoire et l’évolution artistique à travers les siècles. La religion n’est pas oubliée : la première étant l’hindouisme auquel a succédé le bouddhisme Mahayana du roi bâtisseur des temples d’Angkor, Jayavarman VII. Mais à sa mort (1218) est adopté le bouddhisme Theravada : les prêtres ne servent pas d’intermédiaires entre l’homme et la divinité et peuvent quitter le monastère quand ils le désirent. Plus de 90 % des Cambodgiens le pratiquent, avec toutefois des survivances hindouistes. Nous partons vers le lac proche de Tonlé Sap (ou « grand lac d’eau douce »), qui porte le même nom que la rivière qui aboutit à Phnom Penh, car il est impossible de délimiter la rivière et le lac. C’est la plus grande étendue d’eau douce de l’Asie du sud-est : 2500 km2 en saison sèche contre 12000 km² durant la mousson.

Visite d’un village qui flotte durant la mousson, mais nous sommes en saison sèche. Nous admirons les jolies maisons en bois à pilotis, dont les pieux sont hauts de 6 à 7 mètres. Ce village a pour nom Kompong Phluk ou « port de défenses ». Les habitants vivent surtout de la pêche à la crevette, mais ils cultivent aussi quelques lopins de terre : on aperçoit entre autres la culture de courgettes. Puis nous embarquons pour visiter la mangrove attenante et accéder au lac, véritable ressource économique pour le Cambodge, classé réserve de biosphère par l’Unesco en 1997, avec près de 300 espèces de poissons d’eau douce, 100 variétés d’oiseaux aquatiques, des tortues et même des crocodiles dont nous verrons quelques spécimens élevés par les habitants !

Au dîner qui suit, nous assistons à une démonstration d’arts martiaux comme le bokator aux techniques diversifiées, symbole du patrimoine culturel du pays ; ainsi qu’à des danses traditionnelles comme la danse Apsara, emplie de grâce, témoignage de la résistance culturelle du Cambodge à tous les conflits, déjà présente, nous le verrons, sur les fresques des temples d’Angkor.

 

Puis nous partons, dans un minibus, avec un autre chauffeur, à la découverte de la montagne sacrée, le parc national de Kulen, où l’on voit les lingas et les yonis tapissant le lit de la rivière. Certains d’entre nous gravissent les marches d’un immense escalier pour admirer une statue de 8 mètres représentant un Bouddha couché qui a atteint le nirvana, sculpté dans un énorme rocher de grès. En contrebas, deux cascades qui, en cette saison sèche sont entourées d’un sol boueux et non d’un lac. Une foule immense se presse le long de stands où l’on vend à peu près de tout. Car durant 3 jours, du 13 au 16 avril c’est la fête ! La fête du nouvel an khmer ! Il nous reste à voir le temple de grès rose, Banteay Srei, construit au 10e siècle, sous Jayalavam V, dédié à Shiva, un peu éloigné du site d’Angkor.

 

C’est là qu’en 1923, André Malraux, qui deviendra ministre de la Culture sous De Gaulle, à court d’argent, fit découper prestement les statues des bas-reliefs représentant d’innombrables divinités, pour les embarquer incognito et les vendre aux enchères. Arrêté avec son épouse, il fut condamné à 3 ans de prison ferme, mais à cause d’une pétition organisée par André Breton et signée par une vingtaine de personnalités du monde littéraire, la peine se réduira à 1 an avec sursis. Les bas-reliefs réintégrèrent leur place.

 

Le soir, le spectacle de cirque donné par les étudiants de l’école d’arts ONG Phare Ponleu Selpak, nous ravit ; en particulier les acrobaties avec travail aérien. L’éthique de cette école est décrite sur un panneau : accepter les biens matériels (figurés ici par une pluie de riz), mais avec la modération de Bouddha.

 

Vient le jour suprême : l’accès en tuk-tuk et la visite à pied des trésors d’Angkor. D’abord Angkor Thom, « la grande ville » occupant un quadrilatère de 9 km². Nous marchons, comme le re découvreur Henri Mouhot, botaniste français, chasseur de papillons, en 1860, « de merveilles en merveilles ». Elle a été construite sous le roi Jayavarman VII à la fin du 12e siècle, et abandonnée au 16e siècle. L’entrée sud, majestueuse, après le passage de douves très larges, impressionne par sa hauteur et l’immense statue de Bouddha à 4 faces, à moins que ce ne soit une représentation des rois… ou de Brahma, dieu à 4 têtes… Le pont sur les douves présente 54 statues géantes de chaque côté ; à gauche des dieux sereins et pacifiques ; à droite des démons grimaçants. On a la sensation d’entrer dans un monde magique !

 

Au centre de cette grande cité, le Bayon ou le reflet terrestre du dieu Indra. Ambiguïté certaine entre l’hindouisme, et le bouddhisme cher à Jayavarman VII. Des 54 tours, il ne reste que 37 aujourd’hui, aux visages énigmatiques mais souriants. Sur les murs, de nombreuses scènes de la vie quotidienne sont gravées ; ainsi la bataille navale sur le Tonlé Sap, dont on a parlé plus haut, entre les Khmers et les Chams. Labyrinthe de passages, de galeries et de tours ; un système très perfectionné de gestion de l’eau alors que nous sommes au Moyen-Age ! Au dehors, de nombreuses pierres renversées les unes sur les autres, dont certaines sont sculptées, attendent sans doute une restauration.

Le monastère royal, Ta Prohm (« ancêtre de Brahma »), paraît envahi par la jungle, dans une sorte d’union entre la pierre et les arbres ; il est dédié à la mère du roi Jayavarman VII. D’énormes arbres enveloppent de leurs racines les vestiges du temple : fromagers, banians, figuiers-étrangleurs, âgés de plus de six cents ans.

Ta Prohm est mondialement connu grâce au film « Tomb Raider » (2001), où jouait Angelina Jolie. Nous passons devant la Terrasse des Éléphants, et la Terrasse du Roi lépreux qui fait référence à une statue se trouvant sur la plate-forme.

Et l’apothéose : Angkor Vat ! Lorsque nous arrivons, nous le reconnaissons de loin, tant nous l’avons vu représenté. Quelle émotion ! C’est lui, c’est bien lui ! Le plus grand des monuments religieux du monde, avec ses 5 tours, construit au début du 12e siècle, sous Suryavarman II, pour honorer la divinité Vishnou, l’un des principaux dieux du panthéon hindou avec Shiva et Brahma. Des bas-reliefs racontent l’histoire du serpent Naga, sommé par les dieux de produire l’élixir de vie. Le temple d’Angkor Vat est édifié sur le principe des temples-montagnes : les hauts murs représentant les montagnes, les douves la mer et au sommet la résidence des dieux, à savoir le Mont Méru, montagne sacrée de la mythologie hindoue.

Ce temple est l’emblème du Cambodge : l’identité de tout Cambodgien en découle ; d’ailleurs il figure sur le drapeau et il est inscrit depuis 1992 au patrimoine de l’Unesco. On estime qu’il a fallu 6000 éléphants, 300 000 ouvriers (esclaves) pour réaliser cette construction (en 30 ans environ). Son orientation vers l’ouest, côté du soleil couchant, indiquerait qu’il s’agit d’un mausolée. Le reflet du temple dans l’eau des douves incite à la photo de notre groupe. On aperçoit des tentes orange dressées pour fêter le nouvel an khmer, qui a lieu en ce moment du 13 au 16 avril.

Nous n’oublierons pas, revenus dans les rues de la ville, ces « happy new year » qui fusent de toutes parts, en anglais comme en cambodgien, mais aussi et surtout les jeux avec de l’eau, caractéristiques de cette fête. Chaque Cambodgien rivalise d’habileté pour asperger l’autre d’eau venant de revolvers-jouets à eau, de casseroles, de bacs, de tuyaux d’arrosages. On arrose tout le monde (parfois on s’enduit de farine) dans la joie et la bonne humeur. Nous ne sommes pas épargnés, ou du moins notre bus dont les vitres nous protègent ; leur plaisir devient le nôtre, nous les saluons en souriant. Cela donne lieu à des embouteillages terribles ; nous serons obligés pour atteindre un restaurant, de sortir du bus, et de marcher craintivement à la queue-leu-leu, sous la bannière d’un garde, policier ou autre…

Et nous n’avons pas parlé des hôtels, très confortables, des restaurants où les plats, très colorés et goûteux deviennent de plus en plus variés au fur et à mesure du voyage, comme celui avec le porc grillé, ou encore la fondue cambodgienne. Et quelle présentation ! Esthétique, raffinée.

Le jour de notre retour, Ho Sim nous apprend que le président chinois Xi Jinping vient d’arriver en visite diplomatique au Cambodge, car, nous explique-t-il, la Thaïlande et le Vietnam étant les alliés des Américains, le Cambodge est allié à la Chine. Équilibre !

C’est avec enthousiasme, que nous avons parcouru les 1560 km d’une destination qui mérite d’être mieux connue, y compris pour découvrir le mode de vie de ses habitants, comme ce voyage l’a permis

 




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